Le rôle du progrès technique en économie a été particulièrement mis en évidence par Joseph Schumpeter, théoricien de l’innovation. J. Schumpeter distingue d’abord le concept d’invention de celui d’innovation. L’invention est la découverte d’un principe nouveau ou d’un produit nouveau qui n’est pas toujours susceptible d’applications pratiques. L’innovation est la mise en application d’un principe théorique ou d’une idée nouvelle. [….] Dans les années 1930, Chester Carlson travaille chez un avocat new-yorkais où il passe l’essentiel de son temps à recopier des plaidoiries et les minutes des procès. Il est obnubilé par le désir d’inventer un système qui pourrait mettre fin à ce travail fastidieux. Pensant qu’il est inutile de se situer sur le terrain de la photographie où, pense-t-il, Kodak aurait déjà inventé le processus s’il existait, il réfléchit aux possibilités de la reproduction par contact. En 1940, il dépose un brevet sur un procédé de reproduction électrostatique. Après la guerre, Carlson cherche à exploiter son brevet, mais il ne dispose pas de fonds nécessaires au développement de son procédé. Il le propose à IBM qui refuse le jugeant sans avenir. En 1952, une petite firme inconnue, du nom de Haloid, achète le brevet ; elle change de nom et, sous la marque Xerox, met sur le marché, en 1953, la première machine à photocopier. Dans les marchés qui suivent, Xerox inonde le marché mondial.
Dans ce cas, on voit bien que les deux phases sont très distinctes : une phase de recherche très artisanale, aboutissant à l’invention ; une phase de développement très couteuse qui débouche sur l’introduction de l’innovation dans le monde économique.[….]
J. Schumpeter distingue cinq grandes catégories d’innovations ;
- La fabrication d’un bien nouveau ;
- L’introduction d’une nouvelle méthode de production ;
- L’ouverture de nouveaux débouchés pour un produit donné ;
- La découverte d’une nouvelle source de matière première ;
- La réalisation d’une nouvelle organisation.
Aujourd’hui, sans renier cette classification, on retient souvent la distinction en deux catégories principales : l’innovation de produit et l’innovation de procédé [….].
L’introduction de l’innovation dépend souvent de la personnalité, plus ou moins dynamique, plus ou moins ouverte au risque, de l’entrepreneur. Schumpeter accorde dans son œuvre une importance majeure à l’entrepreneur dynamique et innovateur, vecteur fondamental du progrès technique et de la croissance. Cette vision a été retenue par la pensée économique contemporaine et l’on qualifie fréquemment cet entrepreneur dynamique d’ entrepreneur schumpétérien ».
Jean-Marie Chevalier, Introduction à l’analyse économique, La Découverte, 19