Proposition de corrigé du DS sur la séquence « Quelles sont les principales défaillances du marché ? »
Sujet : A l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous analyserez l’efficacité des droits à polluer en Europe.
(Documents du sujet à la fin de la proposition de corrigé)
Le terme « droit à polluer » renvoie « au système d’échanges de quotas d’émissions de carbone en Europe ». Ce marché du carbone a été mis en place par l’Union Européenne afin de lutter contre les externalités négatives des émissions de gaz à effet de serre qui contribuent au réchauffement climatique de la planète. Ces externalités négatives engendrent une défaillance de marché, c’est-à-dire une situation dans laquelle le marché ne parvient pas à allouer de façon optimale le climat. Le climat est un bien collectif mondial, il est donc non-excluable- il est impossible d’en empêcher l’usage- et non-rival -l’utilisation d’un agent n’empêche pas celle d ‘un autre. Pour le protéger, il faudrait une gouvernance mondiale qui mettrait en place des règlementations ou des incitations. Les divers protocoles signés par les Etats tendent à mettre en place cette gouvernance mais elle est basée sur la bonne volonté de chaque Etat. L’Union Européenne a néanmoins mis en place ce marché dans cette logique de gouvernance. Elle s’appuie sur les recherches d’un économiste Ronald Coase, pour qui il suffit de donner un droit de propriété sur l’usage d’un bien environnemental et d’autoriser ses échanges pour permettre une régulation par le prix.
Le marché carbone fonctionne avec le principe suivant : la Commission européenne définit un plafond d’émissions pour une certaine durée, en informant les agents économiques qu’il diminuerait sur le long terme. Ce plafond est partagé en les agents économiques sous forme de quotas échangeables. Un quota (= le droit à polluer) équivaut pour une installation industrielle à l’autorisation d’émettre 1 tonne d’équivalent de Co2. A la fin de la période, les industriels sont dans l’obligation de justifier d’un équilibre entre les droits à polluer qu’elles ont et les émissions qu’elles ont réalisées.
Si elles ont un déséquilibre en leur défaveur, elles ont le choix entre acheter des droits à polluer sur le marché du carbone ou alors de payer une amende. Pour que ce système soit efficace dans la gestion de ce bien collectif, il faut observer un changement de comportement des entreprises afin d’enregistrer une diminution significative des émissions de CO2 sur le long terme.
Ce système est efficace dans la lutte contre le réchauffement climatique, si le signal-prix à long terme incite les agents économiques à investir afin de réduire leur impact écologique. En effet, les entreprises peuvent anticiper sur le long terme un prix du quota supérieur aux coûts des actions nécessaires pour investir dans les technologies sobres en émission de gaz à effet de serre. Elles seront donc incitées à fournir les efforts nécessaires et contribueront ainsi à la préservation du bien collectif en mobilisant leurs ressources financières ou en recherches et développement dans de nouveaux investissements. Il peut y avoir une disparité entre les pays de l’EU en termes de structures de marché ou en termes de coût de production. Par exemple, le site du ministère français de la transition écologique et solidaire, souligne une disparité de 14,5 points de pourcentage de 2016 par rapport 2015, entre l’évolution des émissions françaises liées à la production d’électricité [+13%] et l’évolution de celles liées aux secteurs industriels [à l’exception du ciment et des métaux].
Ce système est également efficace si les agents économiques sont incités à mettre en place des actions de réductions sur leurs organisations structurelles au quotidien grâce à un prix d’équilibre du marché carbone supérieur aux coûts de réorganisation. En effet, si une entreprise espère obtenir un gain à l’échange grâce au marché carbone, elle est incitée à s’organise différemment. Son objectif sera en fin de période d’être créditrice en quotas. Par exemple, si une industrie bénéficie d’un droit à polluer de 100 tonnes équivalent Co2 et qu’elle a émis que 80 en fin de période, elle peut soit revendre la différence sur le marché carbone ou alors la garder en réserve. Elle est donc incitée à réduire ses émissions en modifiant la culture de l’entreprise et en développant une coopération entre les acteurs de l’entreprise. En mettant en place un parallèle entre Etats, on peut souligner que l’Allemagne, malgré sa volonté de favoriser l’écologie, a structurellement un fort impact en émission en énergie carbone, car elle a dû compenser les fermetures de son parc nucléaire par une augmentation de l’exploitation du charbon pendant la période de transition. C’est l’un des raisons qui pourrait expliquer la faible diminution entre 2005 et 2016 des émissions en équivalent Co2, soit 12,72%[1], contre 34,42% en France : la différence dans l’organisation et la culture de chaque pays et également de chaque pays.
Ce système n’est pas efficace dans la lutte dans le réchauffement climatique, si une majorité d’entreprises perçoivent le signal-prix du carbone comme favorable au maintien des émissions de gaz à effet de serre. En effet, si l’arbitrage « coût-avantages » des industries se porte en faveur des quotas de carbone, car le coût privé de production d’adaptation à la transition écologique est supérieur aux coûts des quotas, les entreprises continueront à produire une offre supérieure au coût social et continueront à avoir une répercussion négative sur le bien-être d’autres agents économiques en atténuant leurs compensations financières. Il s’agit donc toujours d’une externalité négative. Le parallèle peut être réalisé avec les Etats de l’Union Européenne. La fiscalité de chaque Etat influence les coûts de production des entreprises, ce qui contribue à des comportements différents. De même, les Pays de l’Union Européenne sont spécialisés dans des domaines économiques différents et n’ont donc pas les mêmes charges financières. Par exemple le poids des banques dans le PIB du Luxembourg est important alors que l’Allemagne est une grande puissance industrielle.[2] Chaque agent économique se comporte donc comme un agent rationnel[3] et cherche à maximiser son profit en fonction du contexte dans lequel il évolue. Il peut même adopter le comportement d’un passager clandestin et ne pas fournir de réels efforts tout en bénéficiant du système. On observe une disparité très importante dans la diminution des émissions de CO2 entre ces deux pays : 5% pour l’Allemagne entre 2005 et 2016 et 42% pour le Luxembourg sur la même période.
© G.Bourc'his
[2] En 2017, le PIB de l’Allemagne » 3 700 milliards de dollars alors que celui du Luxembourg » 50, donc la différence d’évolution est peu exploitable
[3] Selon la théorie de la main invisible de Adam Smith